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L'ELECTION

 

 

 

Les électeurs se réunirent donc à l’auberge du prince d’Isenghien, qui servait jusque-là de chambre échevinale, c'est-à-dire de lieu de réunion pour les administrateurs du village de Lomme. Cet établissement perdura jusqu’à la guerre de 1914-1918. Les gens que vous apercevez sur cette photo composent le conseil municipal de Lomme en 1912, mais il s’agit bien du même endroit.

 

 

Cette photo est intéressante à regarder et à commenter, car elle montre comment on se trouvait alors à la charnière entre deux mondes. Cependant, il est intéressant de constater la permanence d’habitudes anciennes : d’abord le lieu de réunion, qui est le même qu’auparavant ; ensuite, les électeurs sont convoqués à son de cloche et l’assemblée, rassemblée par le bailli du seigneur qui en explique le déroulement, sera présidée par le curé, dont l’autorité morale reste intacte, accompagné d’anciens échevins. Mais cadre nouveau en même temps, annonciateur des temps nouveaux : la prestation du serment civique, celui d’être fidèle à la Nation, à la Loi et au Roi, qui semble dire qu’une époque ancienne, celle de l’arbitraire et des privilèges, est révolue.

 

Le procès-verbal nous dit qu’ils furent 48 à participer à cette élection. Est-ce beaucoup, est-ce peu ? Il est difficile en fait de se prononcer car nous n’avons pas de repère exact à cette époque. Jules Brenne parle d’une population d’environ 1.800 habitants. Si l’on enlève les femmes et les enfants, combien pouvaient prétendre à la citoyenneté ? 300, 400 peut-être ? Et à la citoyenneté active ? Environ 200 probablement ? Alors peut-on hasarder un taux de participation de 25 % ? A titre de comparaison, la population lommoise, forte aujourd’hui d’environ 28.000 habitants, compte dans ses rangs à peu près 18.000 électeurs. Et à chaque fois environ 12.000 vont voter, soit les deux tiers.

La différence ne s’arrête pas là. En fait, tout est différent. A l’époque, on élit le bureau de vote, composé d’un président (le curé Martin), d’un secrétaire (Vincent Joseph Six, ancien échevin) et de trois scrutateurs (Jean-Baptiste Pollet, maître François Joseph Lesage notaire du village et Louis Joseph David).

Mais ce n’est pas tout. Bien sûr, pas de radio ni de télévision à la fin du XVIII° siècle, peu savent lire et de toute façon il n’y a pas de gazette locale pour s’intéresser à cette élection. Alors on peut se demander s’il y avait des campagnes électorales et comment elles se menaient. Arrivait-on à la réunion sans s’être posé la question de savoir qui serait élu ou des consignes avaient-elles préalablement circulé ? Avait-on monté des cabales (ce qui dans l’esprit de l’époque signifiait complot) pour faire élire un tel ou un tel ? Faute de mémoires ou de traces écrites, nous ne le savons pas.

De plus les opérations de vote, si elles sont décrites de manière succincte, diffèrent quelque peu des nôtres. Pas d’isoloir, ni de liste électorale ou d’émargement. On griffonnait généralement des bouts de papier qu’on glissait dans un grand vase en forme d’urne, selon les témoignages les plus courants.

Ensuite venaient les opérations de dépouillement. Pour être élu immédiatement il fallait avoir la majorité des voix plus une, c’est ce qu’on appelait la pluralité absolue des suffrages. Si au bout de deux tours de scrutin l’on n’avait pu se décider, l’on en venait alors à un dernier vote, et celui ou ceux ayant recueilli le plus de voix étaient élus. C’était ce qu’on appelait le scrutin à la pluralité relative.

Comment se sont passées ces élections ? Rappelons tout d’abord que les citoyens devaient choisir parmi eux des contribuables payant un impôt égal à 10 journées de travail, ce qui limitait déjà les possibilités.

L’élection du maire est vite réglée. Dès le premier tour, François Joseph Nollet est élu avec une écrasante majorité de suffrages et devient le premier maire de la commune de Lomme. Les anciennes notabilités du village n’ont pas été sollicitées.

Les électeurs doivent ensuite choisir les officiers municipaux - on les appellerait les adjoints aujourd’hui - qui composent alors le corps municipal, élément actif et permanent du conseil général de la commune. Là aussi, Pierre Joseph Six, Ignace Deroullers, Antoine Lernould, Mathieu Guermonprez et Louis David sont élus rapidement.

Les citoyens présents doivent ensuite désigner le procureur-syndic de la commune. C’est un titre qui n’existe plus aujourd’hui. Bien qu’élu par les citoyens, le procureur-syndic représente en fait le roi auprès de la commune, mais il a aussi en charge la défense des contribuables locaux. Aucune décision ne peut être prise sans qu’il ait donné son avis, de là les nombreuses mentions que l’on trouve dans les délibérations municipales « le procureur syndic ayant été entendu, il a été décidé… » Pour exercer cette fonction, les Lommois présents ce jour-là à l’auberge du Prince d’Isenghien font confiance, à une majorité écrasante, à Jean-Baptiste Pollet.

Enfin la séance se termine par l’élection des notables de la commune, que nous pouvons assimiler à nos conseillers municipaux. Sont élus le baron de Mengin, Jacques Capon, Pierre François Hazebroucq, André Sébastien Villette, Jacques François Delecourt, Michel Cattrice, Pierre Joseph Reublin, Jean-Paul Keysel, Clément Pollet et Pierre Joseph Carlier.

Enfin viendra s’ajouter à la liste des administrateurs de la commune François Joseph Lesage, le notaire du village.

On peut déjà tirer un premier bilan de ces élections. Les anciens leaders du village, représentants du seigneur, le bailli et le lieutenant bailli, n’ont pas été sollicités.

 

 

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